Les dommages consécutifs à un désordre décennal relèvent de ce même régime de responsabilité

Écrit par Pascal Dessuet

La cour de Cassation approuve les juges du fonds pour avoir considéré que les dommages consécutifs à un désordre décennal affectant les existants, en l’espèce un incendie total relevait aussi du régime de la RC décennale en termes de responsabilité : un arrêt explicite qui s’inscrit sur ce point dans une continuité

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Mais la Cour de Cassation dans un arrêt non publié approuve aussi les juges du fonds pour avoir condamné un assureur RC décennale à prendre en charge au titre des garanties obligatoires d’assurance les dommages affectant les existants… :

A la décharge des magistrats, le pourvoi ne faisait pas état de l’article L 243-1-1 II C Ass… et parlait d’existant « indissociables » là où la loi parle d’existants « indivisibles »…

Cass Civ 3ème 20 avril 2017 N° de pourvoi: 16-13603 inédit

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 9 décembre 2015), que M. et Mme X... ont constitué les sociétés civiles immobilières Malakoff et Elvis (les SCI), qui ont acquis un immeuble ; que la société FC2D a installé dans la maison d'habitation une cheminée avec un insert, l'ensemble étant fourni par la société Brisach ; qu'un incendie a entraîné la destruction totale du bâtiment ; que les SCI et M. X... ont, après expertise, assigné la MACIF, la société FC2D, la SMABTP et la société Goupama, assureurs respectivement en garantie décennale et en responsabilité professionnelle de la société FC2D, ainsi que la société Brisach, en indemnisation de leurs préjudices ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SMABTP fait grief à l'arrêt de dire la société FC2D entièrement responsable des préjudices subis par M. X... et les SCI ;

Mais attendu qu'ayant retenu qu'un logement entièrement détruit par l'incendie était impropre à sa destination, la cour d'appel, qui a pu en déduire, sans modifier l'objet du litige, que la garantie décennale de la société FC2D était due pour la totalité du dommage affectant le bâtiment, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SMABTP fait grief à l'arrêt de dire que la société FC2D était tenue, in solidum avec son assureur, d'indemniser M. X... à hauteur de 203 372, 62 euros, de les condamner à lui régler la somme de 190 750, 62 euros et de condamner la société FC2D à payer à la MACIF la somme de 67 133 euros ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a accordé une certaine somme au titre du préjudice de jouissance subi par M. X..., a retenu, sans violer le principe de la réparation intégrale du préjudice, que c'était avec pertinence que le tribunal avait admis, au titre des préjudices annexes, les frais afférents à la réinstallation de M. X... dans un mobil home ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SMABTP fait grief à l'arrêt de dire qu'elle était tenue, in solidum avec la société FC2D et sans recours contre elle, de la somme de 441 759, 58 euros à l'égard des SCI et de la condamner à leur régler la somme de 295 391, 58 euros au titre du reliquat de leur préjudice immobilier ;

Mais attendu qu'ayant exactement retenu qu'en tant qu'assureur de garantie décennale, la SMABTP était tenue d'indemniser l'entier préjudice entrant dans la garantie de l'article 1792 du code civil, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'assureur (la SMABTP) d'un installeur d'insert (la société FC2D) était tenu in solidum avec lui et sans recours contre lui de la somme de 441 759, 58 €, à l'égard des propriétaires d'un immeuble détruit par incendie (les SCI Elvis et Malakoff) et de l'avoir en conséquence condamné à leur régler la somme de 295 391, 58 € au titre du reliquat de leur préjudice immobilier ;

AUX MOTIFS QUE, sur la garantie obligatoire, en tant qu'assureur de responsabilité décennale, la SMABTP est tenue d'indemniser l'entier préjudice entrant dans la garantie de l'article 1792 du code civil ; qu'en l'espèce, la société FC2D était bien tenue d'indemniser intégralement sur ce seul fondement les SCI Malakoff et Elvis ; que ni ces dernières ni l'assuré ne pouvaient donc se voir opposer une clause contractuelle limitant la garantie de l'assureur au seul coût de l'ouvrage qu'il avait lui-même réalisé ou prévoyant un plafond chiffré, alors que l'assuré avait réalisé un insert dont les désordres avaient rendu impropre à son usage l'ouvrage dont il constituait un élément d'équipement ; que la SMABTP devait donc indemniser les deux SCI victimes de l'incendie, in solidum avec son assurée, à hauteur de la somme retenue pour le dommage immobilier, soit 441 759, 58 € et lui devra garantie pour les sommes qu'il serait amené à payer de ce chef ;

ALORS QUE l'assureur de garantie décennale d'un installateur d'insert ayant causé un incendie ne garantit que le paiement des travaux de réparation de l'ouvrage à la réalisation duquel l'assuré a contribué et les ouvrages existants qui lui sont indissociables ; qu'en ayant jugé que la SMABTP devait sa garantie à la société FC2D pour l'intégralité du préjudice immobilier subi par les SCI Elvis et Malakoff, sans rechercher si, s'agissant de travaux sur existants, la garantie de la SMABTP n'était pas limitée au paiement des travaux de réparation de l'ouvrage à la réalisation duquel l'assurée avait contribué et aux ouvrages existants qui lui étaient indissociables, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 241-1 et A 243-1 du code des assurances.