La place des engagements de faire pris par les assurés dans les polices...

Écrit par Pascal Dessuet

Très souvent dans le cadre des polices TRC à propos des mesures de prévention, mais plus curieusement aussi en police DO, les polices font état d’engagement de faire pris par l’assuré.

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Les trois arrêts reproduits ci-après rendent compte de la difficulté de qualifier juridiquement ce type d’engagement et de leur donner une portée en droit des assurances :

Il ne faut pas confondre engagement de faire et déclaration de risque….

Cass Civ 2ème 27 avril 2017 N° 16-13209

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 8 septembre 2006, un incendie a endommagé les parties communes d'un ensemble immobilier, dénommé Copro 29 boulevard Gay Lussac, à Marseille, dont le syndicat des copropriétaires (le syndicat des copropriétaires) était assuré pour ce risque auprès de la société Winterthur, aux droits de laquelle vient la société MMA (l'assureur), ainsi que plusieurs lots à usage de bureaux et d'entrepôts appartenant à la SCI 2A (la SCI) ; qu'ayant refusé les offres d'indemnisation de l'assureur qui entendait faire application de la réduction proportionnelle édictée par l'article L. 113-9 du code des assurances, la SCI, qui avait obtenu en référé la désignation d'un expert, et le syndicat des copropriétaires ont assigné cet assureur en exécution du contrat ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt d'écarter la réduction proportionnelle de prime qu'il oppose à la SCI et au syndicat des copropriétaires, de fixer aux sommes de 1 239 432, 87 euros et de 1 793 911, 39 euros les indemnités totales respectivement dues en vertu du contrat d'assurance Indusplan à la SCI et au syndicat des copropriétaires à la suite de l'incendie du 8 septembre 2006, enfin de le condamner au paiement de la somme de 1 239 432, 87 euros à la SCI et de la somme de 1 793 911, 39 euros au syndicat des copropriétaires, desquelles devront être déduites les provisions déjà versées, avec intérêts au taux légal à compter du 11 janvier 2010 et capitalisation des intérêts échus dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil, alors, selon le moyen :

1°/ que, en cas de constatation d'une omission ou d'une déclaration inexacte de la part d'un assuré après un sinistre, l'indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés ; qu'en l'espèce, il résulte des conditions particulières du contrat d'assurance Indusplan contresigné par l'assuré et le garantissant des risques incendie que « les installations électriques (circuits et matériels) sont contrôlés au moins une fois par an par un vérificateur ou un organisme vérificateur qualifié par l'assemblée plénière des sociétés d'assurance dommages », que, s'agissant des extincteurs mobiles, « tous les bâtiments sont dotés d'une installation d'extincteurs mobiles mise en place par une entreprise qualifiée par l'assemblée plénière des sociétés d'assurance dommages », que « l'assuré s'engage à maintenir l'installation en parfait état de fonctionnement, en se conformant aux consignes d'utilisation et de maintenance établies par l'installateur, en remédiant aux défauts signalés dans les comptes rendus de vérification », que, s'agissant des robinets d'incendie armés, « Tous les bâtiments sont dotés d'une installation de robinets d'incendie armés (…) l'assuré déclare vérifier : faire vérifier annuellement son installation et consigner les résultats dans le registre de contrôle de l'installation qu'il tient à la disposition de l'assureur » ; qu'en considérant, pour refuser de faire application de la réduction proportionnelle pour déclaration inexacte de l'assuré, que le manquement de ce dernier à son engagement de faire vérifier l'installation électrique ainsi que les extincteurs et les robinets incendie armés n'a pas eu pour effet de rendre inexactes ou caduques les déclarations qu'il a faites lors de la conclusion du contrat, quand ce manquement était directement contraire à ses déclarations, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations, a violé l'article L. 113-9 du code des assurances ;

2°/ que, en cas de constatation d'une omission ou d'une déclaration inexacte de la part d'un assuré après un sinistre, l'indemnité est automatiquement réduite, en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés ; qu'en relevant, pour refuser de faire application de la réduction proportionnelle, que le manquement de l'assuré à ses obligations de vérification des installations électriques n'avait pas eu pour effet de modifier l'opinion que l'assureur pouvait se faire du risque, la cour d'appel, qui a statué par une motivation inopérante à écarter cette règle, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 113-9 du code des assurances ;

3°/ que, en retenant que l'inexactitude d'une déclaration d'un assuré s'apprécie au moment de la conclusion du contrat et non postérieurement, quand ce dernier est obligé de déclarer, en cours d'exécution du contrat, toutes les circonstances nouvelles qui ont pour conséquences d'aggraver les risques et rendent de ce fait inexactes ses déclarations initiales, la cour d'appel a violé les articles L. 113-9 et L. 113-2, 2° et 3°, du code des assurances ;

Mais attendu qu'après avoir relevé, par motifs adoptés, que les déclarations de la SCI et du syndicat des copropriétaires n'ont, lors de la souscription de l'assurance, été précédées d'aucune question précise relative aux risques à garantir, l'arrêt retient que le manquement de l'assuré à son engagement de faire vérifier l'installation électrique ainsi que les extincteurs et les robinets incendie armés, allégué par l'assureur, n'avait pas pour conséquence de rendre inexactes ou caduques des déclarations faites lors de la conclusion du contrat d'assurance ; que la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ne pas faire application de la réduction proportionnelle d'indemnité prévue à l'article L. 113-9 du code des assurances ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé

Il ne faut pas confondre engagement de faire et condition de garantie

Cass Civ 2ème 23 Mars 2017 N° 16-15364 Note A Pellissier p 324

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Garage Lach'auto (la société), victime d'un vol dans ses locaux le 25 novembre 2012, a assigné la société Axa France IARD (l'assureur), auprès de laquelle elle avait souscrit un contrat multirisque des professionnels de l'automobile, afin d'obtenir la prise en charge de ce sinistre ;

 Attendu que, pour débouter la société de ses demandes après avoir relevé que les conditions particulières du contrat conclu entre les parties précisent, d'une part, que « le souscripteur déclare que (...) il existe une installation d'alarme réalisée avec du matériel certifié A2P ou NFA2P », d'autre part, que ces conditions particulières « ont été établies conformément aux réponses données aux questions posées par l'assureur lors de la souscription du contrat », l'arrêt constate qu'il n'est pas établi que le matériel d'alarme installé par la société correspond aux normes requises par le contrat d'assurance et retient que, contrairement à ce que plaide la société, il n'est pas question ici d'une « fausse déclaration » de l'assuré entraînant éventuellement la nullité du contrat, mais purement et simplement, comme le soutient l'assureur, d'un défaut d'assurance dès lors que les conditions exigées par la police ne sont pas réunies ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que l'installation d'une alarme répondant à des normes spécifiques avait été érigée en condition de la garantie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Un engagement de faire sous peine de non-assurance, n’est pas une condition de garantie mais une exclusion et dès lors elle est assujettie aux règles de précision et de limitation par rapport aux garanties du contrat, ce qui n’est pas le cas du visa « des normes réglementaires en vigueur… »

Cass Civ 2ème 27 avril 2017 N° de pourvoi: 16-14397

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 15 mars 2017, où étaient présents : Mme Flise, président, M. Besson, conseiller rapporteur, M. Savatier, conseiller doyen, Mmes Vannier, Gelbard-Le Dauphin, M. Boiffin, conseillers, M. Becuwe, Mmes Touati, Isola, Bohnert, conseillers référendaires, M. Grignon Dumoulin, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Besson, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Allianz IARD, l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique pris en ses première et troisième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 2 juillet 2015), que M. X...a été blessé, le 24 mai 2008, lors d'une fête taurine, en procédant à la mise à feu d'un engin pyrotechnique, dit « marron d'air », marquant le départ d'une capéa organisée par l'association Lou Seden (l'association), assurée auprès de la société Allianz (l'assureur) par un contrat de responsabilité civile « Organisateur de fête ou de manifestation temporaire » ; que M. X...a assigné l'association, l'assureur et la caisse primaire d'assurance maladie du Gard (la CPAM) en indemnisation ;

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de dire qu'il est tenu de garantir les conséquences de la responsabilité de l'association et de le condamner in solidum avec celle-ci à payer des sommes à M. X...et à la CPAM, alors, selon le moyen :

1°/ que constitue une condition de garantie et non une clause d'exclusion la clause par laquelle l'assureur subordonne la prise d'effet de la garantie à l'exécution d'une obligation de l'assuré, extérieure au risque lui-même ; qu'en considérant que constituait une clause d'exclusion, la clause par laquelle l'assureur acceptait de garantir le risque lié à l'utilisation du marron d'air à la condition que l'association respecte les normes de sécurité résultant des dispositions légales et règlementaires la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 113-1 du code des assurances ;

2°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, pour déclarer l'assureur tenu à garantir les conséquences de la responsabilité de l'association et le condamner avec l'association à payer certaines sommes à monsieur Julien X...et à la caisse primaire d'assurance maladie du Gard, la cour d'appel a énoncé que l'assureur qui excipe que l'association s'est engagée « sous peine de non-assurance (...) à respecter les normes de sécurité résultant des dispositions légales et réglementaires en vigueur », ne justifie pas des dispositions qui auraient été violées ; qu'en statuant de la sorte, alors qu'il ressortait du dossier pénal versé aux débats par monsieur X..., et en particulier des cotes D 14 et D 11 expressément visées par l'assureur dans ses écritures, que lors de son audition, M. Y..., président de l'association, avait admis ne pas connaître « les règles exactes de mise en oeuvre des engins pyrotechniques (cote D 14) », alors que ces règles étaient consultables sur le site de la préfecture (cote D 11) accessible à tous ; qu'en omettant d'examiner ces éléments de preuve dont il résultait que l'association n'avait pas respecté ses obligations contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la clause d'un contrat d'assurance garantissant la responsabilité civile d'un assuré, par laquelle celui-ci s'engage « sous peine de non assurance (...) à respecter les normes de sécurité résultant des obligations légales et réglementaires en vigueur », qui, ne subordonnant pas la prise d'effet de la garantie à la réalisation d'une condition précisément définie, revient à priver l'assuré du bénéfice des garanties en considération de circonstances particulières, révélatrices de la norme de sécurité enfreinte, dans lesquelles le risque s'est réalisé, s'analyse en une clause d'exclusion ;

Que la cour d'appel ayant décidé que cette clause d'exclusion ne peut valablement être opposée en ce qu'elle aboutirait à annuler les garanties souscrites, faisant ainsi ressortir qu'elle n'était pas limitée, les éléments de preuve dont fait état la seconde branche du moyen étaient sans portée