Le tiers-victime ne peut se prévaloir du non-respect d'une obligation de résultat

Écrit par Pascal Dessuet

Le non-respect d’une obligation de résultat par une entreprise titulaire d’un marché passé avec un copropriétaire justifiant l’application d’une présomption de responsabilité sans avoir à démontrer de faute, ne saurait à lui seul constituer la faute dont les tiers pourraient se réclamer sur le terrain délictuel, en l’espèce, une faute vis-à-vis des autres copropriétaires à raison des dommages subis en répercussion

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Cass Civ 3ème 18 mai 2017 N° pourvoi : 16-11203

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 novembre 2015), que la copropriété clinique Axium est composée notamment du lot n° 7 situé dans le bâtiment A, propriété de la SCI Hydraxium et donné à bail à la société Axium Kinésithérapie, du lot n° 1 situé dans le bâtiment B et d'autres lots n° 2 à n° 6, situés au sous-sol du bâtiment A, propriété de la société Holding d'Aix-en-Provence et donnés à bail à la société Sorevie Gam ; qu'en 2004, la société Sorevie Gam et le syndicat des copropriétaires ont fait réaliser, dans le bâtiment A, des travaux de chauffage, climatisation et traitement de l'eau, par le groupement constitué par la société Dalkia France et la société Faure ingénierie, des études étant confiées à la société G2E ; qu'une première instance a opposé la société Sorevie Gam aux sociétés Dalkia France, Faure ingénierie et G2E ; qu'en 2007, invoquant une importante condensation dans les locaux du lot n° 7, la SCI Hydraxium et sa locataire, la société Axium Kinésithérapie, ont, après expertise, assigné en indemnisation le syndicat des copropriétaires et la société Holding d'Aix-en-Provence qui a appelé en garantie les sociétés Dalkia France et G2E ;

Attendu que, pour déclarer la société Dalkia France responsable de la condensation anormale dans le lot n° 7, rejeter ses appels en garantie et la condamner à paiement, l'arrêt retient qu'il résulte de la convention du 5 avril 2004 que la société Faure ingénierie et la société Dalkia France se sont engagées solidairement à l'égard de la société Sorevie Gam à livrer un ouvrage conforme aux prévisions contractuelles et exempt de vices, qu'en manquant à cette obligation, la société Dalkia France a commis une faute à l'origine de la condensation anormale et que cette faute engage sa responsabilité délictuelle à l'égard de la SCI Hydraxium et de la société Axium Kinésithérapie ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs qui, tirés du seul manquement à une obligation contractuelle de résultat de livrer un ouvrage conforme et exempt de vices, sont impropres à caractériser une faute délictuelle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS

L’application de la jurisprudence issue de l’arrêt de l’Assemblée plénière 6 octobre 2006 N° 05-13255 suppose quelques nuances, notamment dans le domaine de la construction, car s’agissant des constructeurs et des sous-traitants, la responsabilité les concernant est la plupart du temps présumée et ne suppose donc pas l’établissement d’une faute contractuelle. Dès lors, les tiers ne peuvent donc les rechercher du seul fait de la mise en jeu de la présomption de responsabilité les concernant…

Cet arrêt ne remet nullement en cause les principes issus de l’arrêt de 2006 et s’inscrit dans un courant jurisprudentiel bien établi notamment s’agissant des constructeurs et des assujettis à la RC décennale ou bien s’agissant des sous-traitants, à une RC sans faute au titre de l’obligation de résultat :

Cass Civ 3ème 27 mars 2008 N° 07-10473 ; Cass Civ 3ème 22 octobre 2013 N° 12-25053 ; Cass Com 12 juillet 2011 N° 06-17155