La validité des clauses de saisine préalable de l'ordre des architectes avant toute action

Écrit par Pascal Dessuet assurances responsabilité décennale

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La clause d’une convention de Maîtrise d’œuvre passée avec un architecte, stipulant l’obligation préalable de saisine de l’Ordre avant toute action judiciaire en cas de litige sur l’exécution du contrat est légale.

 

Cass Civ 3ème 26 mars 2014 N° de pourvoi: 12-25150

Attendu que la société AS2 fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande à l'encontre de M. X... et de la MAF au titre des parkings non matérialisés, des avaloirs manquants et de la non-réalisation de liaisons architecturales, alors selon le moyen, que la clause de saisine préalable à toute action judiciaire en cas de litige sur l'exécution du contrat de l'ordre des architectes ne pouvait porter que sur les obligations des parties au regard des dispositions de l'article 1134 du code civil et n'a pas vocation à s'appliquer lorsque la responsabilité de l'architecte est recherchée sur le fondement de l'article 1792 du même code ; qu'en se bornant à affirmer que le litige opposant la société AS2 et M. X... concernait les obligations de ce dernier quant à son implication dans les défauts de conformité, sans rechercher, si la responsabilité de l'architecte était recherchée sur le fondement de l'article 1792 du code civil, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les demandes concernant les parkings non matérialisés, les avaloirs manquants et la non-réalisation de liaisons architecturales, dénonçaient des non-conformités et retenu la responsabilité contractuelle de la société AS2 sur le fondement de l'article 1147 du code civil, la cour d'appel qui, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit que la saisine préalable du conseil de l'ordre était obligatoire, a légalement justifié sa décision de ce chef

La mise en cause de l’assuré n’est pas nécessaire pour exercer l’action directe contre l’assureur, a fortiori la mise en cause d’un organisme tiers ne saurait davantage s’imposer même par convention… Cass Civ 3ème 18 décembre 2013 Pourvoi n° 12-18.439.Arrêt n° 1500.P Dessuet RGDA 2014 p 116 et B Boubli RDI 2014 p 105, mais encore faut-il soulever le moyen…

 

Néanmoins, pour juger de la validité de ce type de clause, il est possible de se placer à deux niveaux :

 

- Si on s’en tient au premier niveau, celui de la légalité de la clause, cet arrêt s’inscrit dans une continuité jurisprudentielle : Cass Civ 3ème 4 novembre 2004 N° 03-13.002 et Cass Civ 3ème 28 avril 2011  N° 10-30.721

Dans l’arrêt du 26 mars en effet, le seul point débattu était la question de savoir si le préalable s’appliquait à la mise en jeu d’une RC de droit commun ou de la RC décennale, laquelle est d’ordre public et ne peut donc faire l’objet de stipulations conventionnelles restrictives.

 

- Si par contre, la question est abordée au deuxième niveau, sous l’angle des conditions de mise en œuvre de l’action directe par les tiers victime, la solution est alors différente, comme cela a pu être récemment jugé :

 

Cass Civ 3ème 18 décembre 2013 Pourvoi n° 12-18.439.Arrêt n° 1500 P Dessuet RGDA 2014 p 116 et B Boubli RDI 2014 p 105

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 1er Mars 2012), que la société Casa Ambrosino a fait appel à la société d'architecture PGDA, inscrite au tableau de l'ordre des architectes d'lle-de-France et assurée auprès de la société Mutuelle des architectes français (la MAF), pour des travaux sur son immeuble de Sète ; qu'un différend est né entre les parties ; qu'après avoir saisi le conseil régional de l'ordre des architectes du Languedoc-Roussillon, le maître d'ouvrage a assigné en référé puis au fond la société PGDA et la MAF en indemnisation de ses préjudices ;

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Mais sur le second moyen qui est recevable :

 

Vu l'article L. 124-3 du code des assurances;

 

Attendu que pour déclarer irrecevable l'action de la société Casa Ambrosino contre la MAF, l'arrêt retient que le maître d'ouvrage n'a pas procédé à la saisine préalable du conseil de l'ordre d'Ile-de-France prévue au contrat d'architecte ;

 

Qu'en statuant ainsi alors que la saisine préalable, par le maître d'ouvrage, de l'ordre des architectes prévue au contrat le liant à l'architecte, n'est pas une condition de recevabilité de l'action directe engagée contre l'assureur de celui-ci, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE

 

Cet Arrêt de décembre 2013, s’inscrit alors dans un autre courant jurisprudentiel assez ancien, consistant à considérer que la mise en cause du responsable, ne peut constituer un préalable à la mise en jeu de l’action directe contre l’assureur,

De là il s’évince qu’il en va de même de tout autre préalable instauré par voie de convention, telle que la saisine préalable du conseil de l’Ordre…