Police RCD : le libellé de la clause sur les déclarations d'activité

Écrit par Pascal Dessuet

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Selon un arrêt inédit rendu par la Cour de Cassation dans un autre domaine que celui de la construction, la clause au terme de laquelle « les activités déclarées sont mentionnées « à titre indicatif et non limitatif», ne dispense pas l’assuré de déclarer préalablement ses activités…

Il ne s’agit certes que d’un arrêt de rejet non publié validant l’interprétation d’une clause par les juges du fond, mais, pareille jurisprudence pourrait justifier à l’avenir de préciser le libellé de ce genre de clause très fréquente dans les polices RC décennale, pour éviter tout malentendu.

 

Ainsi conviendrait-il de préciser le fait que, la couverture demeure acquise sans déclaration préalable dès lors que l’activité entre dans l’objet social de la société assurée.

 

Cass Civ 2ème 11 décembre 2014 N° de pourvoi: 13-21511 Chronique Maud Asselain RGDA 2015 p 114

 

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 6 juin 2013), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 14 janvier 2010, pourvoi n° 09-12.290), que la société Potier Vandier, propriétaire d'un bâtiment à usage d'entrepôt, qu'elle entendait louer à la société Gipsy, a confié la construction d'une extension de l'existant à la société Georgeault ; que cette dernière, invoquant l'achèvement de l'ouvrage bien que celui-ci n'ait pas fait l'objet d'une réception expresse, a réclamé à la société Potier Vandier le paiement des travaux selon mémoire définitif du 10 janvier 2005 ; qu'un incendie s'est déclaré le 26 janvier 2005, dans le bâtiment neuf qui a été entièrement détruit ainsi que le bâtiment voisin auquel le feu s'est communiqué ; que les services de gendarmerie ont conclu que l'incendie était imputable à un préposé de la société Gipsy qui avait procédé dans l'immeuble, avant qu'il ne lui soit confié en location, à des travaux d'installation d'étagères avec l'aide d'un fer à souder dont les étincelles avaient embrasé des ballots de mousse entreposés à proximité ; que la société Potier Vandier, qui a refusé de régler à la société Georgeault le solde des travaux effectués, motif pris de l'absence de réception de l'ouvrage, a assigné celle-ci devant le tribunal de commerce en remboursement des sommes déjà versées à titre d'acomptes ; que la société Georgeault a appelé en intervention forcée la société Gipsy et la société Ace European Group Limited (la société Ace), assureur responsabilité civile de la société Potier Vandier et de la société Gipsy, aux fins d'être garantie par cette dernière société de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ;

 

Attendu que la société Gipsy fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement du 13 septembre 2007 en ce qu'il a retenu la garantie de la société Ace envers la société Gipsy, en ce qu'il a condamné la société Ace à verser une indemnité de 3 000 euros à la société Gipsy et l'a condamnée aux dépens, et statuant à nouveau, de dire que la société Ace ne doit aucune garantie à la société Gipsy, alors, selon le moyen :

 

1°/ que les clauses des conditions particulières d'une police d'assurance prévalent sur celles des conditions générales ; qu'en jugeant que la société Ace serait fondée à refuser sa garantie à la société Gipsy, l'accident étant « survenu à la suite d'une activité d'installation non déclarée », quand la clause insérée dans les conditions particulières, stipulant que « les activités déclarées sont mentionnées "à titre indicatif et non limitatif" », devait l'emporter sur celle, contraire, insérée dans les conditions générales, stipulant que « l'assureur garantit les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que l'assuré peut encourir ¿ du fait des activités déclarées par l'assuré », la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

 

2°/ que le juge ne peut, sous couvert d'interprétation, écarter l'application d'une clause parce qu'il l'estime contraire à l'équilibre du contrat ; qu'en jugeant que « s'il est mentionné aux conditions particulières de la police que les activités déclarées sont mentionnées "à titre indicatif et non limitatif", cette mention doit s'interpréter en ce que l'assuré peut, s'il le souhaite, étendre le champ des activités exercées, mais à condition de les déclarer » et qu' « en décider autrement reviendrait à permettre à la société assurée d'exercer toutes sortes d'activités sans les déclarer à l'assureur, lequel ne serait alors pas mis en état d'apprécier le risque assuré et ses conséquences », la cour d'appel a privé de toute portée une clause contractuelle claire et précise, motif pris des supposées conséquences de son application pour l'assureur, et ce faisant violé l'article 1134 du code civil ;

3°/ qu'un contrat clair ne doit pas être interprété mais appliqué ; qu'en jugeant que « s'il est mentionné aux conditions particulières de la police que les activités déclarées sont mentionnées "à titre indicatif et non limitatif", cette mention doit s'interpréter en ce que l'assuré peut, s'il le souhaite, étendre le champ des activités exercées, mais à condition de les déclarer », quand il résultait du caractère expressément « non limitatif » des activités déclarées par l'assuré que la garantie de l'assureur n'était pas limitée à l'exercice des activités énumérées, mais devait être étendue à l'ensemble des activités exercées par l'assuré, la cour d'appel a dénaturé cette clause claire et précise et violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient que les sociétés Gipsy et Potier-Vandier ont souscrit, auprès de la société Ace une police responsabilité civile, l'une en sa qualité « d'importateur, négociant de jouets en peluche », l'autre en celle de « propriétaire non occupant de bâtiments donnés en location pour l'entreposage de produits divers » ; qu'au point B de la police d'assurance, intitulé « objet et étendue de la garantie », il est précisé que l'assureur garantit les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que l'assuré peut encourir en raison de dommages corporels, matériels et immatériels consécutifs ou non, causés à des tiers et survenant du fait des activités déclarées par l'assuré et exercées librement par lui ou pour son compte par des sous-traitants ; que la notion d'activité déclarée doit être entendue strictement, et ne peut concerner un accident survenu à la suite d'une activité d'installation non déclarée, pour laquelle aucune police spécifique n'a été souscrite, quand bien même elle serait nécessaire pour permettre ensuite le développement de l'activité déclarée, à savoir l'activité d'importateur et de négociant de jouets en peluche ; que s'il est précisé aux conditions particulières de la police que les activités déclarées sont mentionnées « à titre indicatif et non limitatif », cette expression doit s'interpréter en ce que l'assuré peut, s'il le souhaite, étendre le champ des activités exercées, mais à condition de les déclarer ; qu'en décider autrement reviendrait à permettre à la société assurée d'exercer toutes sortes d'activités sans les déclarer à l'assureur, lequel ne serait alors pas mis en état d'apprécier le risque assuré et ses conséquences ; que les travaux d'installation réalisés par la société Gipsy, avec utilisation d'un outil à feux nus, ont créé un risque nouveau, ou, à tout le moins ont aggravé le risque assuré, le négoce de peluches n'impliquant pas directement ou indirectement l'usage d'un tel outillage ;

Que de ces constatations et énonciations procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a pu déduire, sans dénaturation du contrat liant les parties, que la société Ace était fondée à dénier sa garantie à la société Gipsy ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé