Modélisation des attestations RC décennale : projet de la loi Macron 2ème lecture
Écrit par Pascal DessuetLe 01 juillet dernier, dans le cadre de l’examen en seconde lecture par le Senat du Projet de Loi Macron, les sénateurs adoptent finalement en termes identiques le texte de l’article 25 septies sur la modélisation des attestations d’assurance dans le domaine de la construction obligatoire, tel que voté par l’Assemblée nationale en 2ème lecture en mai dernier.
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Le texte adopté, n’est que la version édulcorée de l’amendement introduit par l’Assemblée en janvier 2015, puis un temps supprimé par le Sénat en 1ère lecture: il aboutit à modifier l’actuel article L 243-2 du Code des assurances dans les termes suivants :
ARTICLE 25 SEPTIES « Amélioration de l'information des consommateurs concernant l'assurance décennale »
Le code des assurances est ainsi modifié :
1° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 241-1, les mots : « être en mesure de » sont supprimés ;
2° L’article L. 243-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « être en mesure de » sont supprimés ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
– la première phrase est complétée par les mots : « jointes aux devis et factures des professionnels assurés » ;
– à la fin de la seconde phrase, les mots : « les mentions minimales devant figurer sur ces attestations » sont remplacés par les mots : « un modèle d’attestation d’assurance comprenant des mentions minimales » ;
c) Après le mot : « absence », la fin du dernier alinéa est ainsi rédigée : « des assurances mentionnées au premier alinéa du présent article. L’attestation d’assurance mentionnée au deuxième alinéa y est annexée. »
Ce qui conduit au texte suivant :
Art L 243-2 C Ass
Les personnes soumises aux obligations prévues par les articles L. 241-1 à L. 242-1 du présent code doivent justifier qu'elles ont satisfait auxdites obligations.
Les justifications prévues au premier alinéa, lorsqu'elles sont relatives aux obligations prévues par les articles L. 241-1 et L. 241-2, prennent la forme d'attestations d'assurance jointes aux devis et factures des professionnels assurés. Un arrêté du ministre chargé de l'économie fixe un modèle d’attestation d’assurance comprenant des mentions minimales.
Lorsqu'un acte intervenant avant l'expiration du délai de dix ans prévu à l'article 1792-4-1 du code civil a pour effet de transférer la propriété ou la jouissance du bien, quelle que soit la nature du contrat destiné à conférer ces droits, à l'exception toutefois des baux à loyer, mention doit être faite dans le corps de l'acte ou en annexe de l'existence ou de l'absence des assurances mentionnées au premier alinéa du présent article. L’attestation d’assurance mentionnée au deuxième alinéa y est annexée. »
Trois observations :
1ère observation : Aux termes de ce texte, on supprime purement et simplement la modélisation de l’attestation DO telle qu’elle figurait dans la version de l’amendement adopté en janvier dernier.
On peut légitimement se demander ce qui a pu justifier tous ces amendements visant à obtenir la suppression d’un des acquis majeur de l’amendement dans sa version de janvier dernier alors même que le rétablissement de l’amendement sous cette forme nouvelle le fut présenté en Commission sous l’intitulé « Amélioration de l'information des consommateurs concernant l'assurance décennale »
2ème observation La modélisation n’en n’est plus une : En effet, qu’est-ce qu’un « modèle » comportant des « mentions minimales », l’expression est parfaitement antinomique, autant écrire « un morceau de papier » comportant des mentions minimales:
Un modèle est par définition figé, il ne peut être complété, faute de quoi on n’atteint pas le but recherché qui est la standardisation des justificatifs.
On rappellera par ailleurs, qu’en l’état, c’est le projet actuel d’Arrêté sur les mentions minimales qui va s’appliquer, lequel ne prévoit aucune mention sur le paiement de la prime comme cela fut un temps déploré par M François Brottes, l’auteur de l’amendement de rétablissement du texte supprimé par les Sénateurs en 1ère lecture, lorsqu’il avait pris connaissance du projet d’Arrêté sur les mentions minimales devant figurer dans une attestation d’assurance RC décennale[1]
3ème observation L’ajout à l’avant dernière ligne de l’article L243-2, de cette expression « de l'absence des assurances mentionnées au premier alinéa du présent article. L’attestation d’assurance mentionnée au deuxième alinéa y est annexée. » jette le trouble sur l’obligation des rédacteurs d’actes en matière de justification d’assurance dans le domaine de la construction et n’a plus aucun sens :
- Les assurances mentionnées au premier alinéa sont les assurances visées aux articles L. 241-1 et L. 242-1 C Ass, c’est-à-dire l’assurance DO, mais aussi les assurances de Responsabilité décennale des constructeurs : L 241-1 C Ass. Comment imagine-t-on un instant que le Notaire puisse désormais attester dans le corps de l’acte de l’existence ou non des polices d’assurance RC décennale des constructeurs… ?
- Par ailleurs, tandis que, l’expression « l’attestation d’assurance mentionnée au deuxième alinéa y est annexée. » renvoie aux articles L. 241-1 et L. 241-2, c’est à dire à deux types de polices : Police RC décennale des constructeurs et des vendeurs, alors même que le mot attestation est au singulier, il n’est plus question de DO dans les justificatifs devant être annexés (Art L 242-1 C Ass).
En d’autres termes, après avoir demandé aux notaires de faire état dans leurs actes, de l’existence ou non d’une police DO, mais aussi de l’ensemble des polices d’assurance RC décennale des constructeurs, la loi leur fera désormais obligation d’annexer dans leurs actes, non plus l’attestation DO comme précédemment, dès lors que son existence est constatée, mais uniquement les attestations RC décennale des constructeurs… !!
Une question est désormais posée : Va-t-on voir demain des signatures bloquées chez les Notaires faute de justification des attestations RC décennale des constructeurs ?
Au minimum le bon texte aurai été :
Art L 243-2 C Ass
Les personnes soumises aux obligations prévues par les articles L. 241-1 à L. 242-1 du présent code doivent justifier qu'elles ont satisfait auxdites obligations.
Les justifications prévues au premier alinéa, lorsqu'elles sont relatives aux obligations prévues par les articles L. 241-1 et L. 241-2, prennent la forme d'attestations d'assurance jointes aux devis et factures des professionnels assurés. Un arrêté du ministre chargé de l'économie fixe un modèle d’attestation d’assurance comprenant des mentions minimales.
Lorsqu'un acte intervenant avant l'expiration du délai de dix ans prévu à l'article 1792-4-1 du code civil a pour effet de transférer la propriété ou la jouissance du bien, quelle que soit la nature du contrat destiné à conférer ces droits, à l'exception toutefois des baux à loyer, mention doit être faite dans le corps de l'acte ou en annexe de l'existence ou de l'absence de l’assurance mentionnée à l’article L 242-1. L’attestation d’assurance mentionnée ci-avant visée y est annexée. »
Le texte apportant une réelle protection du consommateur aurait été :
« Les personnes soumises aux obligations prévues par les articles L. 241-1 à L. 242-1 du présent code doivent justifier qu'elles ont satisfait auxdites obligations.
Les justifications prévues au premier alinéa, lorsqu'elles sont relatives aux obligations prévues par les articles L. 241-1 et L. 241-2, et L 242-1 prennent la forme d'attestations d'assurance. Un arrêté du ministre chargé de l'économie fixe un modèle type d’attestation d’assurance faisant notamment état du paiement de la prime
Lorsqu'un acte intervenant avant l'expiration du délai de dix ans prévu à l'article 1792-4-1 du code civil a pour effet de transférer la propriété ou la jouissance du bien, quelle que soit la nature du contrat destiné à conférer ces droits, à l'exception toutefois des baux à loyer, mention doit être faite dans le corps de l'acte ou en annexe de l'existence ou de l'absence d'assurance tel que visée à l’article L 242-1. En cas de constat de l’existence d’une telle assurance, l'attestation d’assurance doit y être annexée»
On peut bien évidemment s’interroger sur le point de savoir comment le vote de deux lois successives (Loi Hamon et Loi Macron) sur le sujet de la modélisation des attestations RC décennale peut conduire, après deux ans de débats parlementaires[2], à imposer un modèle d’attestations RC décennale des constructeurs ne comportant pas de mention sur le paiement de la prime tandis que la justification auprès du Notaire de la souscription ou non d’une police Dommages Ouvrage est remplacé par un contrôle improbable de l’état d’assurance RC décennale du vendeur et des constructeurs…
Mais en fait tout s’explique lorsqu’on prend connaissance des échanges lors de l’adoption du texte en seconde lecture par la Commission de l’Assemblée nationale rétablissement l’amendement dans sa nouvelle version et qui prouve, si le texte ne suffisait pas à le démontrer, que la confusion le plus totale régnait dans les esprits:
« Article 25 septies : Amélioration de l'information des consommateurs concernant l'assurance décennale
La Commission examine l’amendement SPE166 du président François Brottes, tendant à rétablir l’article.
M. le président François Brottes. Cet amendement tend à rétablir une disposition adoptée par l’Assemblée, qui a pour but de s’assurer de la validité des attestations d’assurance exigées des maîtres d’œuvre.
M. le ministre. Avis favorable.
Suivant l’avis favorable du rapporteur thématique, la Commission adopte l’amendement SPE166 »
[1] Echanges sur ce qui était alors l’article 25 sexies : http://www.assemblee-nationale.fr/14/cri/2014-2015/20150137.asp#P435982
[2] Le premier amendement sur le sujet ayant été déposé en septembre 2013 dans le cadre des débats sur la loi Hamon