Adoption définitive de la loi Transition énergétique par l'Assemblée Nationale

Écrit par Pascal Dessuet

Le 22 juillet dernier, l’Assemblée Nationale saisie en lecture définitive du projet de loi Transition énergétique a procédé à son adoption.

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Quatre points importants concernant le domaine de la responsabilité des constructeurs :

+ Article 31 (ex 8 bis A)

Après l’article L. 111-13 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 111-13-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 111-13-1. – En matière de performance énergétique, l’impropriété à la destination, mentionnée à l’article L. 111-13, ne peut être retenue qu’en cas de dommages résultant d’un défaut lié aux produits, à la conception ou à la mise en œuvre de l’ouvrage, de l’un de ses éléments constitutifs ou de l’un de ses éléments d’équipement conduisant, toute condition d’usage et d’entretien prise en compte et jugée appropriée, à une surconsommation énergétique ne permettant l’utilisation de l’ouvrage qu’à un coût exorbitant. »

Après l’article L. 111-13 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 111-13-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 111-13-1. – En matière de performance énergétique, l’impropriété à la destination, mentionnée à l’article L. 111-13, ne peut être retenue qu’en cas de dommages résultant d’un défaut lié aux produits, à la conception ou à la mise en œuvre de l’ouvrage, de l’un de ses éléments constitutifs ou de l’un de ses éléments d’équipement conduisant, toute condition d’usage et d’entretien prise en compte et jugée appropriée, à une surconsommation énergétique ne permettant l’utilisation de l’ouvrage qu’à un coût exorbitant. »

 

+ Assurance obligatoire des opérations de géothermies Article 120 ex 30 bis

Après l'article L. 164-1 du code minier, il est inséré un article L. 164-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 164-1-1. - Les professionnels qui interviennent dans l'ouverture des travaux d'exploitation de gîtes géothermiques de minime importance pour l'étude de faisabilité au regard du contexte géologique de la zone d'implantation et pour la conception et la réalisation des forages sont couverts par une assurance destinée à réparer tout dommage immobilier ou ensemble de dommages immobiliers causés à des tiers.

Cette assurance couvre également la surveillance de la zone d'implantation du forage et la réalisation des travaux nécessaires afin d'éliminer l'origine des dommages.

« À l'ouverture des travaux d'exploitation, les professionnels sont en mesure de justifier qu'ils ont souscrit un contrat d'assurance les couvrant pour cette responsabilité et de mentionner le libellé et le montant de la couverture.

« L'assurance de responsabilité obligatoire, définie au chapitre Ier du titre IV du livre II du code des assurances, ne saurait se substituer aux garanties d'assurance de responsabilité obligatoire prévues au premier alinéa du présent article.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article, notamment le montant minimal du plafond de garantie des contrats souscrits, leurs durées de garantie et les obligations que les professionnels sont tenus de respecter dans le cadre des travaux d'exploitation des gîtes géothermiques de minime importance. »

Il s’agit de la création d’une nouvelle obligation d’assurance assurance pour l’activité de géothermie

L’origine des amendements qui donnèrent lieu à ce texte se situe dans un sinistre

http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2013/11/19/01016-20131119ARTFIG00311-alsace-le-village-dont-le-sol-se-souleve.php

 

+ Mention obligatoire de l’engagement ou non de solidarité entre les cotraitants en cas d’intervention en groupement pour des marchés < 100 000 €

Article 18 Ex 5 ter :

L La section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de la construction et de l'habitation est complété par un article L. 111-3-2 ainsi rédigé :

M « Art. L. 111-3-2. – Les marchés privés de bâtiment portant sur des travaux et prestations de service réalisés en cotraitance dont le montant n'excède pas 100 000 € hors taxes comportent, à peine de nullité, les mentions suivantes :

N « 1° L'identité du maître d'ouvrage ainsi que celle des cotraitants devant exécuter les travaux ou prestations de service ;

O « 2° La nature et le prix des travaux ou prestations de service devant être réalisés par chaque cotraitant de façon détaillée ;

P « 3° La mention expresse de l'existence ou non de la solidarité juridique des cotraitants envers le maître d'ouvrage ;

Q « 4° Le nom et la mission du mandataire commun des cotraitants. Cette mission, qui consiste notamment à transmettre des informations et documents ainsi qu'à coordonner les cotraitants sur le chantier, ne peut être étendue à des missions de conception et de direction de chantier assimilables à une activité de maîtrise d'œuvre. »

+ Contre toute attente, adoption d’un amendement N° 13 présenté par deux députés de l’opposition, ayant pour objet la suppression de l’article 5 bis A, pourtant vote à deux reprises par l’Assemblée lors de deux précédentes lectures, malgré l’avis contraire du Sénat :

Pour mémoire l’article en question énonçait :

Art 5 bis A

Le chapitre Ier du titre II du code de la consommation est complété par une section 18 ainsi rédigée :

Section 18

Contrats de prestation visant à l’amélioration de la performance énergétique ou environnementale d’un bâtiment

« Art. L. 121–115. – Tout contrat de prestation visant à l’amélioration de la performance énergétique ou environnementale d’un bâtiment indique, à peine de nullité et par une mention expresse, si le prestataire s’oblige ou non à atteindre un niveau d’amélioration de la performance énergétique ou environnementale et précise, le cas échéant, ce niveau.

« L’absence de cette mention dans le contrat est punie d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale. L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 141-1-2.

« Un décret précise les prestations mentionnées au premier alinéa du présent article. »

Il n’est pas sans intérêts de reproduire les échanges qui ont conduit à sa suppression :

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 4 et 13.

La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n4.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement est important, puisqu’il vise à supprimer l’article 5 bis A. Si nous comprenons bien l’intérêt de cet article, il n’en paraît pas moins très difficilement applicable aux yeux des professionnels du bâtiment. Il risque même d’apporter une certaine lourdeur pour les entreprises évoluant dans le secteur du bâtiment.

Cet article avait été supprimé lors de l’examen du texte au Sénat. Il a été réintroduit en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, lors des travaux de la commission spéciale. Il prévoit que, dans le cadre d’un contrat de prestation visant à une amélioration de la performance énergétique ou environnementale d’un bâtiment le prestataire indique s’il s’oblige ou non à atteindre un niveau de performance énergétique ou environnementale, qu’il précise le cas échéant.

Cet article est très fragile parce qu’il n’existe pas – je tiens vraiment à le souligner – de définition précise de la performance énergétique ou environnementale, ce qui va obligatoirement créer une incertitude juridique pour les professionnels du bâtiment. Cette disposition semble très difficilement applicable car nous ne connaissons pas les instruments qui vont permettre d’évaluer le niveau de performance énergétique ou environnementale. Ce niveau dispositif participe à la complexification de la réglementation du secteur du bâtiment, qui subit déjà la crise de plein fouet.

Je dois vous indiquer, madame la ministre, chers collègues, que la réintroduction de cet article a profondément troublé l’ensemble des professionnels du bâtiment. Toutes les organisations nationales disent que, quand bien même elles voient bien l’intérêt du dispositif, ce n’est pas applicable et cela entraînera encore plus de complexité. Je pense donc qu’il est vraiment nécessaire de supprimer cet article, madame la rapporteure, même si nous en comprenons bien l’esprit.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n13.

M. Martial Saddier. C’est encore une fois notre collègue Tardy qui a déposé cet amendement.

L’article 5 bis A offre l’exemple typique d’une disposition qu’on croit bonne et qui va peser sur les entreprises, notamment le secteur du bâtiment – cela vient d’être dit par mon collègue Pancher. Pour l’essentiel supprimé au Sénat, il prévoit que, dans le cadre d’un contrat de prestation d’amélioration de la performance énergétique d’un bâtiment, le prestataire s’oblige à atteindre un niveau d’amélioration de la performance énergétique.

Cet article est difficilement applicable, pour des raisons techniques mais aussi parce qu’il n’existe pas, à ce jour, de définition précise de la performance environnementale. La teneur des sanctions est aussi un petit peu choquante : une amende de 15 000 euros !

Notons également que la Cour de cassation considère que les stipulations d’un contrat dans lequel les contractants ne s’engagent à rien sont nulles. Notons encore que cette disposition risque de créer des contentieux au niveau des assurances.

Sous couvert de protection du consommateur, nous en venons malheureusement à créer des choses inapplicables ! Nous le vivons concrètement.

(Les amendements identiques nos 4 et 13, acceptés par la commission et le Gouvernement, sont adoptés.)

Deux observations :

+ Au cas où cela aurait échappé au lecteur, dans ce texte qui ne s’appliquait qu’au bénéfice des seuls consommateurs, il ne s’agissait pourtant que de préciser «si le prestataire s’oblige ou non à atteindre un niveau d’amélioration de la performance énergétique et précise, le cas échéant, ce niveau.»

+ Il n’est pas sans intérêt de lire dans ces échanges que chacun des auteurs de l’amendement indiquait « qu’il n’existe pas de définition précise de la performance énergétique ou environnementale » alors même que :

- On visait « Tout contrat de prestation visant à l’amélioration de la performance énergétique » c’est-à-dire le vaste champ des travaux de rénovation énergétique.

Qui avait-il donc de si extraordinaire dans un contrat dont l’objet est « l’amélioration de la performance énergétique » d’indiquer si le prestataire s’engageait ou non à améliorer ladite « performance énergétique » ?

- Dans la même loi deux articles plus loin, on légifère précisément sur la responsabilité en matière de « performance énergétique »