Les constructeurs et leurs assureurs ne peuvent agir contre l'assureur DO
Écrit par Pascal DessuetLire en pdf : flash 9992 constructeurs assureurs DO.pdf
Cette décision constitue un rappel : nonobstant l’effet relatif des contrats, la mauvaise exécution d’un contrat peut constituer une faute dont peuvent se réclamer les tiers.
Néanmoins en matière d’assurance construction obligatoire, il n’est pas permis aux constructeurs ou à leurs assureurs RC décennale, de rechercher la faute de l’assureur DO dans la gestion du sinistre
Cass Civ 3ème 9 avril 2014 N° 13-15555 Publié au Bulletin
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 5 février 2013), rendu sur renvoi après cassation (3e chambre civile, 27 mai 2010, pourvoi n° 09-14.107, Bull. civ. III, n° 106), que la société Modling, maître de l'ouvrage, assurée en police dommages-ouvrage, par la société Cigna, aux droits de laquelle se trouve la société Ace European Group Limited (Ace) a, sous la maîtrise d'oeuvre de M. X..., architecte, assuré par la MAF, chargé la société Asco assurée par la Société mutuelle du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP) de l'exécution du lot « étanchéité » dans la construction de bâtiments ; qu'une mission de contrôle technique a été confiée à la société Socotec, également assurée par la SMABTP ; que la réception est intervenue le 6 janvier 1992 ; qu'à la suite de l'apparition de désordres, la société Ace, condamnée par un arrêt du 17 avril 2003 à payer à la société Modling des sommes au titre du préfinancement des travaux de reprise, a exercé un recours subrogatoire contre Mme X..., venant aux droits de Guy X... décédé, M. Y..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Asco, la société Socotec et les assureurs ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi provoqué, réunis :
Attendu que la MAF et la SMABTP font grief à l'arrêt de les condamner in solidum avec Mme X..., à payer à la société Ace la somme de 3 489 624 euros avec intérêts légaux et capitalisation, alors, selon le moyen, que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; que l'assureur dommages-ouvrage est responsable envers les tiers, notamment les constructeurs et leurs assureurs, en cas de méconnaissance de ses obligations légales ayant aggravé les désordres ; qu'en l'espèce, Mme X... et la Mutuelle des architectes français ont soutenu que la compagnie Ace, assureur dommages-ouvrage, avait effectué une proposition d'indemnisation insuffisante, ce qui avait entraîné une aggravation des désordres ; que pour rejeter leur recours contre cet assureur, la cour d'appel s'est bornée à retenir que le responsable d'un dommage et son assureur sont sans qualité pour critiquer la prise en charge du sinistre par l'assureur de la chose, et que l'assureur responsabilité de l'entrepreneur doit prendre toute mesure utile pour éviter l'aggravation des désordres ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 1382 du code civil et L. 242-1 du code des assurances ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu à bon droit que les assureurs en responsabilité de l'architecte et de l'entrepreneur, auxquels incombait la charge finale de la réparation des désordres relevant de l'article 1792 du code civil, devaient prendre toutes les mesures utiles pour éviter l'aggravation du sinistre et ne pouvaient pas se prévaloir des fautes de l'assureur dommages-ouvrage, qui auraient pu concourir à l'aggravation des désordres ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois
Cette décision se situe en droite ligne de la jurisprudence applicable jusqu’ici :
Cass Civ 3ème 1 mars 2006 N° de pourvoi: 04-20399 Publié au Bulletin , RDI 2006, p. 178, obs. Pascal Dessuet ; RGDA 2006, p. 445, obs. M Perier ; obs. G. Courtieu, RC et Ass mai 2006, chr. 172)