L’obligation de dépollution de l’acquéreur d’un terrain : la condition de négligence de l’acquéreur

Écrit par Pascal Dessuet

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L’acquéreur d’un site pollué sur lequel se trouvait une installation classée, ne peut être rendu débiteur de l’obligation de dépollution que pour autant qu’il ait fait preuve de négligence ou s’il ne pouvait ignorer leur existence à la date de l’acquisition.

CE 24 oct. 2014, Sté Unibail Rodamco, req. n° 361231

Sur la responsabilité de l’Etat au titre des mesures prise à l’égard de la société Unibail-Rodamco :

4. Considérant que, pour écarter l’engagement de la responsabilité de l’Etat au titre de l’illégalité fautive des trois arrêtés préfectoraux, respectivement en date des 19 octobre 1994, 17 janvier 1996 et 5 octobre 1998, pris sur le fondement de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement et prescrivant à la société Unibail-Rodamco la remise en état du site, la cour administrative d’appel de Paris a jugé que la circonstance selon laquelle la société pouvait être regardée, en sa qualité de propriétaire, comme détenteur des déchets polluant le sous-sol et les eaux souterraines du site, au sens des dispositions de la loi du 15 juillet 1975 relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux, aujourd’hui codifiée aux articles L. 541-1 et suivants du code de l’environnement, faisait obstacle à ce que l’illégalité fautive entachant ces arrêtés puisse être regardée comme étant à l’origine des préjudices allégués par la société à l’appui de sa demande indemnitaire ;

5. Considérant, toutefois, que sont responsables des déchets, au sens des dispositions de la loi du 15 juillet 1975, les producteurs ou autres détenteurs connus des déchets ; qu’en leur absence, le propriétaire du terrain sur lequel ils ont été déposés peut être regardé comme leur détenteur, au sens de l’article L. 541-2 du code de l’environnement, et être de ce fait assujetti à l’obligation de les éliminer, notamment s’il a fait preuve de négligence à l’égard d’abandons sur son terrain ou s’il ne pouvait ignorer, à la date à laquelle il est devenu propriétaire de ce terrain, d’une part, l’existence de ces déchets, d’autre part, que la personne y ayant exercé une activité productrice de déchets ne serait pas en mesure de satisfaire à ses obligations ;

6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’en se fondant, pour juger que la société Unibail-Rodamco était responsable de l’élimination de ces déchets, sur la seule circonstance qu’elle était propriétaire des terrains pollués par des solvants chlorés provenant de l’exploitation de l’Imprimerie François, alors qu’il lui appartenait de se prononcer au regard des principes rappelés au point 5, la cour administrative d’appel de Paris a commis une erreur de droit ; que, par suite, son arrêt doit être annulé en tant qu’il statue sur l’indemnisation des préjudices résultant des illégalités fautives qui entacheraient les arrêtés préfectoraux des 19 octobre 1994, 17 janvier 1996 et 5 octobre 1998 ; N° 361231 - 4 -

7. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 000 euros à verser à la société Unibail-Rodamco au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

 

D E C I D E :

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Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 11 mai 2012 est annulé en tant qu’il statue sur l’indemnisation du préjudice résultant de l’illégalité fautive des arrêtés préfectoraux des 19 octobre 1994, 17 janvier 1996 et 5 octobre 1998