Que dois-je déclarer au titre de l’assiette de l’assurance Dommages-Ouvrage?

Écrit par Pascal Dessuet

Sur la base de l’Arrêt Cass Civ 3ème 11 septembre 2013 N° 12-19483 FS-P+B, qui fait l’objet d’un flash actualité, on pourrait proposer la réponse suivante :

 

Les coûts liés à la réalisation de l’ouvrage, mais pas seulement.


Par coûts liés à la construction de l’immeuble, on entend le coût des travaux + les honoraires techniques, y compris ceux du CSPS. Le terrain n’entre pas dans l’assiette de la DO.

Par contre les travaux préparatoires doivent être inclus dans l’assiette, quand bien même ne seraient-ils pas susceptibles d’être affectés d’un désordre décennal.

(Cass Civ 3ème 20 novembre 2013 N° de pourvoi: 12-28102)

Ce n’est pas le cas par contre, des travaux de démolitions qui n’aboutissent pas à la construction d’un ouvrage

L’hésitation est permise par contre à propos des travaux de terrassement, dès lors qu’on trouve de la jurisprudence à propos de désordres affectant des remblais. La prudence commande donc de les inclure.

En TRC, ce montant est toujours déclaré HT, mais en DO HT ou TTC selon que l’acquéreur récupère ou non la TVA.

 

S’agissant des lots concernant certains  éléments constitutifs ou d’équipement: selon les cas :

 

1) Les éléments d’équipement à vocation exclusivement professionnelle (Art 1792-7 C Civil): ne doivent pas être inclus dans l’assiette.

 

Attention cependant

Dans la mesure où les marchés déterminent une destination spécifique à l’ouvrage, cette destination conventionnelle est prise en compte par la jurisprudence. Dès lors, tous les équipements nécessaires pour rendre l’ouvrage propre à satisfaire à cette destination doivent demeurer dans l’assiette :

 

Ex : une centrale photovoltaïque intégrée sur un ouvrage neuf n’entre pas dans la catégorie des équipements à vocation exclusivement professionnels, pas plus que le contrôle d’accès qui touche à la sécurité anti-intrusion ou l’autocommutateur ou encore le câblage informatique dans immeuble à destination de bureau ou les fluides pour un hôpital, le precablage audio/video ou les fauteuils, pour une salle de spectacle etc…

D’une manière la jurisprudence interdit formellement d’exclure de l’assiette de la police des parties d’ouvrage dont la défaillance pourrait affecter la destination de l’ouvrage, même s’il s’agit d’équipement purement mécaniques :

Cass Civ 3ème 18 décembre 2013 N° de pourvoi: 13-11441 P Dessuet RDI 2014 p. 120

 

2) Les éléments destinés à fonctionner  (VMC, climatisation, installation de chauffage etc…) doivent être inclus dans l’assiette, mais également aussi les éléments non destinés à fonctionner, dans la mesure où ils peuvent au minimum être à l’origine d’un désordre de nature décennale.

 

S’agissant des éléments non destinés à fonctionner, on rappellera que depuis l’Arrêt (Cass Civ 3ème 11 septembre 2013 N° 12-19483 FS-P+B RDI 2013 Obs P Malinvaud RDI 2013 p 536 et P Dessuet p 544 ; Pascal Dessuet RGDA 2014/1 ; Charbonneau Construction et Urbanisme Novembre 2013 p 9), les désordres concernant les peintures intérieures ou extérieures sans fonction d’étanchéité, plâtres et enduits, revêtements muraux et de sol, carrelage collé, cloisons intérieures, gardes corps etc…sont susceptibles d’entrainer la RC décennale des constructeurs à défaut d’engager la garantie de bon fonctionnement.

 

Attention cependant:

 

Dans la mesure où du fait de la jurisprudence précitée…

- les désordres affectant des éléments non-destinés à fonctionner ne sont plus susceptibles de justifier la mise en cause des constructeurs sur le fondement de la garantie de bon fonctionnement (Art 1792-3 C C Civ)

- et où la FFSA dans le cadre d’une recommandation N° 38/214 d’une du 13 juin 2014 (P Dessuet L'abrogation pour les sinistres à venir de la recommandation CRAC sur la prise en charge de la réparation des désordres affectant la peinture et les tissus tendus RDI 2014 p 524) a invité ses adhérents à appliquer cette jurisprudence sans plus aucune exception, en ce compris la peinture,

… Les assureurs DO ne disposent plus d’un recours sur ce fondement et n’accordent donc plus la garantie de bon fonctionnement pour ce type d’éléments.

Seul le volet décennal de la police DO demeure applicable aux désordres les concernant et le cas échéant, la prise en charge des désordres les affectant à la suite d’un sinistre garanti par ailleurs au titre de la police ce qui justifie à double titre leur maintien dans les assiettes

 

S’agissant du cas particulier des honoraires de Maîtrise d’Ouvrage Déléguée ou d’Assistance à Maitrise d’ouvrage.

La question doit être distinguée de celle sur le point de savoir si le MOD ou l’AMO doit figurer dans la liste des assurés au titre de la police CNR.

 

+ S’agissant de la CNR, la réponse réside dans l’analyse du contrat lui-même :

Dès lors que l’objet de la mission consiste en de l’assistance apportée au Maitre de l’ouvrage pour exercer son activité de Maître d’ouvrage, sans obligation liée à la construction et la livraison de l’ouvrage à une date et un prix convenus, le contrat n’est pas éligible à la RC décennale.

Dans le cas contraire, la mission s’apparentera à celle d’un promoteur immobilier (Art 1831-1 C Civil) ayant reçu mandat de faire faire puis de livrer ensuite, et l’intégration au rang des assurés CNR s’imposera alors.

Il convient cependant de faire état d’une certaine pratique consistant à conférer systématiquement la qualité d’assuré à l’AMO, afin que sa défense soit néanmoins pris en charge, si d’aventure il faisait l’objet d’une action en RC décennale de la part de l’acquéreur.

Si par ailleurs, sa mission intègre certains éléments caractéristiques de la maîtrise d’œuvre le conduisant à surveiller le chantier ou même à délivrer des prescriptions sur la conception, la CNR ne sera pas le bon vecteur et un contrat RC Décennale de Maître d’œuvre devra lui être préféré.

 

+ S’agissant de la DO la question se pose sous un angle différent : celle de l’incorporation ou non dans l’assiette de prime des honoraires concernés par cette activité

Elle ne se pose que dans l’hypothèse où la mission s’analyse en une mission d’assistance à Maîtrise d’ouvrage, et consistera à se demander dans quelle mesure, les travaux de reconstruction nécessitent que soit donnée une mission d’AMO afin d’assister le Maître d’ouvrage.

Rien ne l’impose a priori, sauf éventuellement en cas de sinistre total. La question doit donc être traitée par voie conventionnelle dans la police.

S’agissant des lots espaces verts

S’agissant des espaces verts. Il est possible d’inclure ce lot dans l’assiette en faisant préciser dans le texte de la police DO, que les dommages les affectant ne seront indemnisés qu’en répercussion, et non en vice propre, c'est-à-dire dans l’hypothèse où ils se trouvent impactés par la réparation d’un désordre garanti par la DO, affectant les fondations par exemple…

 

Lire en pdf : que-dois-je-declarer-au-titre-de-lassiette-de-lassurance-dommages-ouvrage 012015.pdf