Le caractère non limité d’une exclusion sur l’entretien justifie de la réputer non-écrite

Écrit par Pascal Dessuet

La clause d’exclusion figurant dans les contrats d’assurance au titre du défaut d’entretien est régulièrement réputée non écrite par la Cour de Cassation. L’arrêt du 15 janvier 2015 n’est qu’une nouvelle illustration de ce courant déjà très ancien

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Qu’en serait-il en assurance obligatoire dans le domaine de la construction ?

- En matière de responsabilité décennale, le défaut d’entretien est parfois admis comme cause d’exonération de la responsabilité décennale.

On observera qu’en matière de performance énergétique, le projet de loi sur la transition énergétique tel que voté par les deux Assemblées, conduit à un changement de perspective et prévoit en son article 8 bis, l’intégration de l’entretien approprié parmi les conditions de mise en jeu de la RC décennale.

Ce changement intervient grâce à l’utilisation d’un procédé juridique curieux, consistant à intégrer dans l’appréciation par le juge de l’impropriété à la destination, le fait que l’ouvrage ait fait l’objet « d’un entretien approprié… ».

La conséquence, c’est que désormais, le juge devra intégrer dans sa motivation sur l’impropriété à la destination des considérations sur le fait que la preuve lui a été apportée d’un entretien approprié, ce qui conduit donc pour les demandeurs agissant en responsabilité contre les constructeurs, à devoir établir de manière positive, que l’entretien de l’ouvrage était approprié, alors qu’auparavant, c’était aux constructeurs, de prouver de manière positive le défaut d’entretien pour s’exonérer de la présomption de responsabilité qui leur était applicable, dès lors que l’impropriété à la destination était démontrée…

 

- En matière d’assurance de la RC décennale, comme de Dommages Ouvrage, le défaut d’entretien figure comme exclusion dans le libellé même des clauses types, ce qui dans un premier temps rend plus difficilement contestable sa reproduction dans le texte des contrats d’assurance.

Néanmoins, force est de constater que ce type de clauses d’exclusion sur le défaut d’entretien sont régulièrement annulées à raison de leur caractère insuffisamment précis, dès lors qu’il s’agit de polices soumises au droit commun de l’assurance.

Il n’est donc pas impossible, qu’à la faveur d’un contentieux à venir, plutôt que l’illégalité de la clause contractuelle, ce soit l’illégalité de la clause-type elle-même qui soit soulevée dans le cadre d’une exception d’illégalité de la disposition règlementaire dans laquelle elle se trouve contenue.

Contrairement à l’illégalité contractuelle qui fut jugée comme non-fondée, il ne sera pas impossible que l’illégalité de la clause type sur ce point puisse être retenue…puisque par son imprécision elle est contraire à l’article L 113-1 C Ass

 

Cass Civ 2ème 15 janvier 2015 N° de pourvoi: 13-19405

Vu l'article L. 113-1 du code des assurances ;

Attendu que pour mettre l'assureur hors de cause et débouter M. et Mme X... de la demande formée contre leur assureur, l'arrêt énonce que la clause ainsi rédigée : « Ce contrat ne garantit pas, indépendamment des exclusions énumérées précédemment, les dommages ou leurs aggravations : (...) dus à un défaut d'entretien caractérisé vous incombant et connu de vous » ; que cette clause, claire et précise au sens de l'article L. 113-1 du code des assurances, n'est pas générale en ce sens qu'elle permet bien à l'assuré d'en connaître le sens avec certitude puisqu'elle se réfère à des critères précis et limitativement énumérés, circonscrits à l'hypothèse d'un défaut d'entretien de l'assuré ;

Qu'en statuant ainsi alors que ladite clause, excluant la garantie de l'assureur de M. et Mme X... en cas de défaut d'entretien ou de réparation caractérisé et connu de l'assuré ne se référant pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées, n'était pas formelle et limitée et ne pouvait ainsi recevoir application en raison de son imprécision, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;